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Dialogue avec Jane Goodall — 3ème Partie La tuerie interminable des animaux

Matthieu : L’intelligence humaine peut produire Gandhi et elle peut aussi produire Hitler. Mais l’intelligence supérieure des humains ne leur donne pas le droit de massacrer à leur guise des milliards et des milliards d’animaux chaque année. Il semble que la valeur d’un animal est pratiquement nulle comparée à celle d’un humain. Pendant l’épisode de la fièvre aphteuse, par exemple, des millions de vaches ont été abattues pour protéger quelques vies humaines menacées.

Jane : Cela a été horrible, et ce n’était même pas nécessaire, puisque les vaches auraient pu être vaccinées.

Matthieu : Cela fut fait pour des raisons purement économiques, fondées ni sur la raison ni sur la compassion. A travers le monde, 150 milliards d’animaux terrestres et 1,5 trillion d’animaux marins sont tués chaque jour dans une grande souffrance pour la consommation humaine. Ceci ne constitue pas un génocide, parce que la motivation et l’objectif sont différents. Le génocide est motivé par la haine et l’objectif en est d’exterminer une population. La tuerie des animaux est motivée par l’appât du gain, l’ignorance, et bien souvent la cruauté, et l’objectif est de les repeupler encore et encore afin de les tuer encore et encore. Mais les méthodes sont les mêmes. Dans le cas du génocide, l’humain est déshumanisé et dévalué, parfois traité de « vermine ». Quant aux animaux, ils sont privés de leur statut d’êtres sensibles et considérés comme de simples objets, des produits alimentaires, des machines à saucisses. Quant aux méthodes, les abattoirs fonctionnent de manière très similaire aux camps d’extermination.

Jane : Et vous savez que les énormes abattoirs industriels américains ont servi de modèle aux Nazis pour concevoir les camps d’extermination massive. Mais ce ne sont pas seulement les méthodes, mais aussi l’attitude des gens qui travaillent dans les abattoirs, des gens qui travaillent dans la recherche médicale, qui restent dans des endroits où l’on torture les animaux. Soit ils ne peuvent le supporter et partent, soi ils deviennent immunisés. Ils peuvent devenir brutaux. J’ai vu des gens dans un laboratoire de recherche médicale qui tenaient un singe à moitié anesthésié et lui faisaient bouger les bras comme une marionnette, et lui mettaient une cigarette dans la bouche, tout en s’esclaffant de rire… C’est incroyable.

Il y a un livre à ce sujet que j’ai commencé à lire et qui m’a rendue physiquement malade. J’ai pensé que je ne pouvais continuer à le lire, puis j’ai lu un peu plus. C’est un livre extraordinaire intitulé Etre the Cow. C’est sur un boeuf condamné à mourir qui raconte son histoire.